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La France peut-elle interdire la commercialisation de CBD ?

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Daniel Bert

Maître Daniel BERT
Avocat au Barreau de PARIS
Maître de conférences des Universités
Docteur en Droit

Le CBD fait partie des nombreux cannabinoïdes (plus de 200) présents dans le chanvre, aussi appelé « cannabis ». Contrairement au delta-9-tétrahydrocannabinol (THC), il n’a pas d’effet psychotrope. Peut-on vendre du CBD en France ? Retour sur les règles françaises et européennes encadrant la commercialisation de cette substance.

La position du droit français est posée par un arrêté du 22 août 1990 portant application de l’article R. 5132-86 du code de la santé publique pour le cannabis. Aux termes de l’artcicle 1er de cet arrêté, « Au sens de l’article R. 5181 du code susvisé, sont autorisées la culture, l’importation, l’exportation et l’utilisation industrielle et commerciale (fibres et graines) des variétés de Cannabis sativa L. répondant aux critères suivants :

-la teneur en delta-9-tétrahydrocannabinol de ces variétés n’est pas supérieure à 0,20 % ;

-la détermination de la teneur en delta-9-tétrahydrocannabinol et la prise d’échantillons en vue de cette détermination sont effectuées selon la méthode communautaire prévue en annexe ».

Et l’article 2 de prévoir les variétés de Cannabis sativa L. autorisées.

Cet arrêté prévoit uniquement, sous conditions, que seule la commercialisation des fibres et graines du chanvre sont licites. A contrario, la France interdit l’exploitation des feuilles et des fleurs de chanvre qui contiennent naturellement du CBD.

Saisie d’une question préjudicielle posée par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence, la CJUE, dans un arrêt KANAVAPE du 19 novembre 2020 (aff. C-663/18) devait examiner la conventionnalité de l’arrêté du 22 août 1990, en ce qu’il restreint la libre circulation des produits du chanvre au seul commerce des fibres et des graines et non pas aux produits issus de la plante entière.

Les juges européens considèrent que le CBD n’est pas un stupéfiant (point 76) et que l’interdiction de la vente du CBD par un Etat contrevient au droit européen et en particulier aux règlements relatifs à la politique agricole commune et au principe de libre circulation consacré par les articles 34 et 36 du TFUE : « l’interdiction de commercialiser le CBD légalement produit dans un autre État membre, lorsqu’il est extrait de la plante de cannabis sativa dans son intégralité, et non de ses seules fibres et graines, constitue une mesure d’effet équivalent à des restrictions quantitatives, au sens de l’article 34 TFUE » (point 82). Encore faut-il également que le taux de THC soit inférieur à 0,2 %. La CJUE rappelle qu’il est néanmoins possible de porter atteinte au principe de libre circulation des marchandises à l’intérieur de l’Union, pour des motifs de protection sanitaire, à condition que cette interdiction soit nécessaire et proportionnée au but poursuivi. La CJUE rappelle que l’évaluation du risque ne peut se fonder sur des considérations purement hypothétiques (point 90).

En l’occurrence, il appartient à la France de prouver un risque pour la santé de commercialisation du CBD. Cette interdiction doit être fondée sur des données scientifiques objectives. En l’espèce, la démonstration de la nocivité du CBD ne semble pas avérée.

Au contraire, lors de sa réunion de novembre 2017, le Comité OMS d’experts de la pharmacodépendance a conclu que, à l’état pur, le cannabidiol (CBD) ne semble pas présenter de potentiel d’abus, ni être nocif pour la santé. Ainsi, le cannabidiol n’étant actuellement pas classé comme stupéfiant, son interdiction ne devrait être fondée juridiquement.

Retrouvez mon entretien avec France 3 POITOU-CHARENTES :  https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/charente-maritime/justice-le-cbd-derive-du-cannabis-en-proces-au-tribunal-de-saintes-2008417.html?fbclid=IwAR0-fwbuZpJykXyNY3FPu2MbVIGTlSFbCJKI9dfyy4iX8phUaQ73gCA-aj4

Photo: Jose-Luis Sanchez Pereyra – H -OxL9GIXvk/unsplash

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